Cour d’appel de Lyon, Aff. Sécurité Sociale, arrêt du 11 décembre 2018
EXPOSE DES FAITS
Un salarié, technicien d’atelier au sein d’une société spécialisée dans la fabrication de nacelles élévatrices, est victime, le 11 décembre 2013 à 8h, sur son lieu de travail de violents maux de tête, suivi d’un malaise. Immédiatement évacué par le SAMU et hospitalisé, il décèdera quelques semaines plus tard des suites d’un accident vasculaire cérébral.
Le 13 décembre 2013, la société effectue une déclaration d’accident du travail, assortie de réserves quant à l’origine de cet accident.
Après enquête administrative, la CPAM de la Loire notifie à la société, par courrier du 13 mars 2014 la prise en charge de l’accident au titre de la législation professionnelle puis, par courrier du 23 avril 2014, celle du décès du salarié.
Saisi par la société, le TASS de Saint Etienne confirme, par jugement du 7 juillet 2017, la décision de la commission de recours amiable déclarant bien fondées les décisions de prise en charge prises par la CPAM de la Loire.
La société ayant alors interjeté appel de cette décision, la Cour d’appel de Lyon se livre, dans un arrêt du 11 décembre 2018, à une lecture qui nous paraît intéressante mais inédite de l’article L 411-1 du Code de la Sécurité Sociale, définissant les éléments constitutifs de l’accident du travail.
OBSERVATIONS
Aux termes de l’article L 411-1 du Code de la Sécurité Sociale, « est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. »
A la lecture de cet article, l’accident du travail suppose donc la réunion de trois éléments : un fait accidentel, évènement ou série d’évènements survenus à une date certaine ; par le fait ou à l’occasion du travail ; dont il est résulté une lésion physique ou psychique.
L’accident ainsi survenu au temps et au lieu de travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité de l’accident au travail. Celle-ci ne peut être combattue que par la démonstration soit du fait que, au moment de l’accident, le salarié n’était pas sous l’autorité de l’employeur, soit du fait que la lésion a une cause totalement étrangère au travail.
C’est sur ce dernier terrain que se plaçait la société afin de tenter de faire échec à la présomption d’imputabilité. Elle faisait notamment valoir que la formation d’un anévrisme constitue nécessairement un état pathologique préexistant étranger au travail. L’enquête réalisée par le CHSCT ayant en outre mis en évidence que le malaise du salarié était survenu alors qu’il se trouvait en situation de travail normale, n’impliquant notamment aucun effort particulier, changement de rythme, stress, choc ou évènement brutal.
La CPAM relevait quant à elle que la société n’apportait pas la preuve d’une cause étrangère au travail.
Se plaçant sous un angle totalement différent, la Cour d’appel de Lyon relève que le malaise subi par le salarié ne constitue pas le fait accidentel, générateur de la lésion constatée, mais la lésion elle-même.
Inversant en conséquence la charge de la preuve, elle considère ainsi que la matérialité de l’accident, à savoir le fait générateur à l’origine du malaise, n’est pas établi par la caisse. Elle relève au contraire que le salarié n’était pas dans une situation de stress et qu’aucun évènement ou incident particulier antérieur et extérieur n’était susceptible d’expliquer la survenance du malaise. En outre aucun élément médical permettant d’établir le lien entre cette lésion et le travail n’était versé au débat.
Dans ces conditions, la Cour déclare les décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la CPAM de la Loire inopposables à la société.
Le raisonnement opéré ici par la Cour d’appel de Lyon a de quoi surprendre en ce qu’il est en parfaite opposition avec la jurisprudence constante de la Cour de Cassation.
A suivre ce raisonnement, il devrait être nécessairement établi un fait accidentel, générateur de la lésion, extérieur à la victime. De fait, les accidents matérialisés par un seul malaise ou l’apparition d’une douleur, en dehors de toute circonstance de travail anormale (chaleur, froid, situation de stress, geste ou posture particulière, etc.), ne pourraient être retenus au titre de la législation sur les accidents du travail et bénéficier de la présomption d’imputabilité.
Telle n’est pourtant pas la position tenue par la Cour de Cassation, qui admet, de jurisprudence constante, l'application de la présomption d'imputabilité en cas d’accident manifesté par l’apparition soudaine d’une douleur au temps et au lieu de travail.
Ainsi, elle a pu considérer que, pour détruire la présomption d’imputabilité attachée au décès d’un salarié consécutif au malaise dont il avait été victime pendant son temps de travail et sur son lieu de travail, il n’était pas suffisant de faire valoir que les fonctions du salarié ne l’exposaient à aucun risque particulier, que ses conditions de travail étaient normales et qu’il ne présentait pas de stress particulier dû à son emploi ou encore qu’aucune anomalie quelconque n’avait été relevée le jour du décès. Seule la démonstration d’une cause au malaise totalement étrangère au travail était de nature à écarter la présomption. (Cass. Civ. 2e, 11 octobre 2006, n°04-30.878).
De même, dans un arrêt récent, elle retient encore que le malaise cardiaque survenu au temps et au lieu de travail et sous l'autorité de l'employeur bénéficie de la présomption d'imputabilité au travail. Peu important que le salarié ait ressenti des symptômes préalables pendant le trajet entre son domicile et son lieu de travail, et que ce malaise ait eu lieu dans la salle de pause, vers laquelle le salarié s’était immédiatement dirigé après avoir pointé pour sa prise de poste, de sorte qu’il n’avait pas effectivement commencé à travailler (Cass. 2e civ., 29 mai 2019 n° 18-16.183).
Pour la Cour de Cassation, il ne fait donc aucun doute qu’un malaise soudain, survenu au temps et au lieu de travail, entre bien dans les prescriptions de l’article L 411-1 du code de la sécurité sociale.
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Le malaise subi par Monsieur G… sur son lieu de travail est une lésion au sens du texte précité et ne doit pas être confondu avec la notion de fait accidentel dans laquelle il doit trouver son origine pour bénéficier de la présomption d’imputabilité.
La caisse primaire d’assurance maladie à qui incombe la charge de la preuve sur ce point ne démontre pas l’existence d’un fait accidentel antérieur en lien avec ce malaise puisqu’il est constant que le salarié n’était pas dans une situation de stress lorsqu’il a été pris d’un violent mal de tête, dès lors qu’il avait pris son service une heure auparavant et qu’aucun incident ou évènement particulier extérieur n’était susceptible d’en expliquer la survenance. Aucun élèment médical n’est versé aux débats faisant un lien avec les ruptures d’anévrisme subies par Monsieur G… et le travail.
Dans ces conditions, la SA HAULOTTE GROUP est fondée à solliciter l’inopposabilité à son encontre de la prise en charge de l’accident et l’imputabilité du décès. »
Cour d’appel de Lyon, Aff. Sécurité Sociale, arrêt du 11 décembre 2018
Claire BUFFIN-CHAMPIN & Sylvain FLICOTEAUX
SELARL DELMAS FLICOTEAUX
Cour d’appel de Grenoble, Ch. Sociale Section B, n° 17/03037, arrêt du 19 septembre 2019
EXPOSE DES FAITS
Suite à son départ à la retraite intervenu le 1er novembre 2014, un salarié engagé en qualité de Directeur de département Syndic d’une société immobilière, soumis à une clause de non-concurrence, est engagé par une société concurrente à compter du 1er décembre 2014 en qualité de Chargé d’étude en activité immobilière. Il fait notamment valoir que s’il est engagé par une société qui est géographiquement dans le périmètre de la clause, il aurait été affecté dans un établissement en dehors de ce périmètre.
Le 30 mars 2016, son ancien employeur engage une action devant le Tribunal de commerce sur le terrain de la concurrence déloyale.
Immédiatement, le salarié saisi le Conseil de prud’hommes et fait valoir d’une part que la clause de non-concurrence ne lui serait pas opposable en ce que son précédent employeur n’avait jamais versé la contrepartie financière stipulée par la clause, et d’autre part que cette clause serait en tout état de cause nulle au regard du caractère dérisoire de cette contrepartie financière.
Par jugement en date du 8 juin 2017, le Conseil de prud’hommes déboute le salarié en retenant que celui-ci n’ayant pas respecté la clause de non-concurrence, l’employeur n’était pas tenu de verser la contrepartie financière, et en jugeant que la nullité n’était pas encourue.
Au terme de son arrêt du 19 septembre 2019, la Cour d’appel de GRENOBLE confirme intégralement cette appréciation et confirme également la condamnation du salarié à verser à son précédent employeur la clause pénale dont le montant est minoré par les juges.
OBSERVATIONS
Bien qu’un certain nombre d’éléments factuels ne soient pas explicités, cet arrêt est triplement instructif en ce qu’il se positionne sur plusieurs questions, souvent sujettes à contentieux, et dont l’appréciation est délicate à anticiper dès lors qu’elles dépendent – au moins en partie – d’une appréciation souveraine des juges du fond.
En premier lieu, la Cour constate que, certes l’employeur n’avait pas versé la contrepartie financière, mais elle rappelle immédiatement que le salarié avait violé la clause de non concurrence dès le 1er décembre 2014, soit un mois après la rupture de son contrat de travail, si bien que l’employeur était délié de son obligation de versement.
Cette appréciation apparaît logique dès lors que l’employeur ne peut certes pas présumer ou anticiper la violation de la clause de non-concurrence, en ne versant pas unilatéralement la contrepartie financière, mais cette contrepartie est souvent versée mensuellement aux mêmes dates que les salaires. Dès lors, le 1er décembre 2014, la première mensualité n’avait pas encore été versée et il pouvait être constaté que le salarié avait enfreint la clause avant même le premier versement.
En tout état de cause, cette appréciation apparaît cohérente avec la notion de loyauté contractuelle.
En second lieu, l’arrêt est plus surprenant en ce qu’il entérine la contrepartie financière dont il pouvait légitimement être craint qu’elle puisse être considérée comme dérisoire au regard des positions adoptées en la matière par la Cour de cassation.
En l’espèce, la clause stipulait une contrepartie financière d’un montant de 10% de la rémunération de référence en cas de rupture à l’initiative de l’employeur, mais de réduite à 5 % en cas de rupture à l’initiative du salarié.
La Cour, après avoir examiné et validé les autres conditions de validité de la clause, juge d’abord que la minoration de cette contrepartie financière en cas de rupture à l’initiative du salarié doit être réputée non-écrite, si bien que la salarié pouvait revendiquer le montant « normal » de 10 % mais elle juge ensuite – ce qui est plus instructif – d’une part que ce montant n’était pas dérisoire et d’autre part que le salarié pouvait revendiquer les termes plus favorables de la convention collective qui prévoyait un montant de 15 % de la rémunération de référence.
Le caractère non dérisoire du montant de 10% n’était pas évident et il est fort à parier que nombre de praticien ne l’aurait pas jugé suffisant, mais la Cour se livre à une analyse de ce seuil au regard de la durée, de l’étendue de la clause, et de l’atteinte effective portée par cette clause à la liberté de travailler.
Il est en effet vrai que la contrepartie financière n’est que la compensation de l’atteinte à la liberté de travailler et donc – en théorie – une appréciation de proportionnalité au cas par cas.
La Cour n’aurait-elle pas là aussi été guidée par des considérations de loyauté contractuelle et, en tous les cas, à une analyse très civiliste des termes contractuels ?
En dernier lieu, la Cour confirme la très importante réduction du quantum de la clause pénale (de 61.055 € à 1.000 €), ce qui constitue une application classique du pouvoir modérateur du juge. Pour ce faire, elle se fonde sur la spécificité de l’activité et la seule réalité du préjudice causé au créancier.
Il est dommage que les éléments ayant conduit à ces appréciations ne soient pas plus détaillés sur ces deux derniers aspects, mais cet arrêt a le mérite de rappeler qu’en matière de clause de non-concurrence, rien n’est écrit d’avance. Attention donc – même si la clause n’est pas nulle – à ses effets tant pour le salarié en termes de contrepartie, que pour l’employeur en termes d’indemnisation.
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Que la contravention par …. Aux termes de la clause de non-concurrence à laquelle il était soumis, ainsi caractérisée, dès les semaines suivant la rupture de son contrat de travail, a délié la SAS … de son obligations réciproque de lui verser la contrepartie pécuniaire prévue à ce titre ; »
« Qu’il convient toutefois de rappeler que doit être réputée non écrite la minoration par les parties, dans le cas d’un mode déterminé de rupture du contrat, de la contrepartie pécuniaire d’une clause de non-concurrence, de sorte que …. Pouvait prétendre à une contrepartie financière d’un montant égale à 10% de sa rémunération de référence »
« Qu’au regard de l’étendue du périmètre géographique, de la durée de l’obligation de non-concurrence fait à …., et de l’atteinte effective à la liberté de travailler de l’intéressé, il convient de considérer que la contrepartie financière à laquelle l’intéressé pouvait prétendre n’était pas dérisoire ; »
« c’est à bon droit que les premiers juges, faisant usage de la faculté qui leur était reconnue par l’article 1152 alinéa 2 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, ont retenu que le montant des indemnités résultant de la clause pénale apparaissait excessif au regard des spécificités de l’activité exercée et du seul préjudice dont l’employeur démontrait la réalité ».
Cour d’appel de Grenoble, Ch. Sociale Section B, arrêt du 19 septembre 2019, RG 17/03037
Claire BUFFIN-CHAMPIN & Sylvain FLICOTEAUX
SELARL DELMAS FLICOTEAUX
Cour d’appel de Grenoble, Ch. Sociale, arrêt du 25 juin 2019
EXPOSE DES FAITS
Suite à son licenciement pour motif personnel intervenu le 16 mars 2015, une salariée, employée en qualité d’assistante service ressources humaines, signe le 30 mars 2015 un accord transactionnel avec son ancien employeur.a
Le 27 juillet 2016, la salariée saisit le Conseil de Prud’hommes de Valence d’une demande de paiement de la contrepartie financière à la clause de non concurrence qui était prévue à son contrat de travail, en application des dispositions de la Convention Collective de la Métallurgie.
Faisant droit à l’argumentation de la société, le Conseil de Prud’hommes, par jugement du 13 septembre 2017, déboute la salariée de l’ensemble de ses demandes.
Sur un appel interjeté par la salariée, la Cour d’Appel de Grenoble se livre, dans un arrêt du 25 juin 2019, à une lecture restrictive des termes de la transaction conclue entre les parties, lecture qui semble à contre-courant de l’évolution marquée ces dernières années par la jurisprudence de la Cour de Cassation sur la portée des accords transactionnels rédigés en des termes généraux.
OBSERVATIONS
Aux termes des articles 2048 et 2049 du Code civil :
« Les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu. »
« Les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. »
Sur le fondement de ces principes, et au terme d’une jurisprudence fluctuante, la chambre sociale de la Cour de Cassation retenait de manière constante une « conception restrictive » de la portée des transactions.
Ainsi, les obligations ayant vocation à s’appliquer postérieurement à la rupture du contrat de travail n’étaient pas, par principe et sauf disposition expresse contraire, comprises dans l’objet de la transaction. Tel était tout particulièrement le cas de la clause de non concurrence. Lorsque l’accord transactionnel ne comportait aucune disposition emportant renonciation à la clause et à sa contrepartie financière, celle-ci n’était pas considérée comme entrant dans l’objet de la transaction (Cass. Soc, 6 mai 1998, n°96-40.234 ; Cass. Soc. 1er mars 2000, n°97-43.471 ; Cass. Soc. 24 janvier 2007, n°05-43.868)
Opérant un nouveau revirement dans sa jurisprudence, amorcé dans un arrêt 5 novembre 2014, puis confirmé dans un arrêt du 11 janvier 2017, la chambre sociale de la Cour de Cassation, s’alignant sur la position de l’Assemblée plénière, semble désormais donner plein effet aux accords transactionnels rédigés en des termes généraux (Cass. ass. plén., 4 juill. 1997, n°93-43.375 ; Cass. Soc., 5 novembre 2014, n°13-18.984 ; Cass. Soc., 11 janvier 2017, n°15-20.040).
Dès lors, l’accord selon lequel le salarié se déclare « être rempli de tous ses droits et ne plus avoir aucun chef de grief quelconque à l'encontre de la société du fait de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail », donne à la renonciation du salarié une portée générale. Toute action en justice ultérieure liée à l’exécution ou la rupture du contrat est alors irrecevable, y compris pour des questions non expressément visées par l’accord, et ce quand bien même il s’agirait de droits futurs.
Tel était le cas dans l’espèce précitée d’une demande d’indemnisation d’un préjudice d’anxiété lié à l’exposition du salarié à l’amiante, préjudice pourtant inconnu lors de la conclusion de l’accord (Cass. Soc., 11 janvier 2017, n°15-20.040).
De même, un salarié ne peut pas plus valablement solliciter le versement de sommes liées à une retraite supplémentaires, dont la mise en œuvre ne devait pourtant intervenir que plusieurs années après la signature de l’accord (Cass. Soc., 30 mai 2018, n°16-25.426).
Encore récemment, la Cour de Cassation a adopté une position similaire à l’égard d’obligations ayant vocation à s’appliquer postérieurement à la rupture, y compris lorsque les droits du salarié ne sont qu’éventuels, comme en l’espèce l’obligation de réembauchage (Cass. Soc., 20 février 2019, n°17-19.676).
Dans son arrêt du 25 juin 2019, bien qu’ayant au préalable relevé que, par le biais de la transaction, la salariée se déclarait remplie de tous ses droits, et renonçait expressément à toute prétention, réclamation, action ou instance de quelque nature qu’elle soit pouvant avoir pour cause, conséquence ou objet, directement ou indirectement, l’exécution ou la cessation des fonctions qu’elle a exercées au sein de la société ou du groupe, la Cour d’Appel de Grenoble s’attache pourtant exclusivement au fait que transaction ne comportait aucune mention dont il résulterait que les parties aient entendu régler la question de l’indemnité liée à la clause de non concurrence, dont il n’était par ailleurs pas justifié que la société ait expressément fait valoir, à l’occasion du licenciement ou postérieurement à celui-ci, sa décision de procéder à sa levée. Dans ce contexte, la Cour d’Appel juge que l’employeur ne peut se prévaloir de l’autorité de la chose jugée attachée à l’accord transactionnel pour s’opposer à la demande de versement de l’indemnité de non concurrence par la salariée.
Bien que conforme à la jurisprudence « classique » relative à la portée de la transaction sur la clause de non concurrence, la position de la Cour d’Appel de Grenoble n’allait pas de soit au regard de la nouvelle approche « extensive » de la chambre sociale de la Cour de Cassation sur la portée des accords transactionnels. Reste donc à voir si la Haute Cour adaptera également son approche au cas particulier de la clause de non concurrence, problématique récurrente dans le règlement des litiges post rupture du contrat de travail.
En marge de cette question, l’arrêt de la Cour d’Appel de Grenoble apporte une précision intéressante sur la notion de « nouvel emploi » au sens de la Convention Collective de la Métallurgie.
Selon ces dispositions, « en cas de licenciement non provoqué par une faute grave, cette indemnité mensuelle est portée à 6/10e de cette moyenne [moyenne mensuelle des rémunérations perçues au cours des 12 derniers mois] tant que l’intéressé n’a pas retrouvé un nouvel emploi et dans la limite de la durée de non-concurrence. » (Art. 10, Accords Nationaux Métallurgie)
Sur ce point, la cour d’Appel de Grenoble considère que ces dispositions ne sauraient être lues comme renvoyant en elle-même à la seule hypothèse d’absence d’emploi salarié. Dès lors, une activité indépendante, comme en l’espèce de consultante, entre bien dans le champ de ces dispositions, empêchant la salariée de revendiquer le bénéfice de l’indemnité de non concurrence majorée.
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Il n’est pas justifié par la société MXXX qu’elle a expressément levé la clause den non concurrence prévue au contrat de travail tant à l’occasion du licenciement que postérieurement à ce dernier. Par ailleurs, la transaction litigieuse ne comprend aucune mention dont il résultait que les parties au protocole ont entendu régler la question de l’indemnité de non-concurrence due à Madame DXXX. La société MXXX ne peut en conséquence exciper de l’autorité de la chose jugée s’attachant au protocole transactionnel du 30 mars 2015 pour s’opposer à la demande en paiement formée par Madame DXXX. Celle-ci est en conséquence fondée à en réclamer le versement.
Il ne ressort pas de la rédaction de la clause de non-concurrence litigieuse, selon laquelle l’indemnité de non –concurrence serait majorée tant que Madame DXXX n’aurait retrouvé un nouvel emploi dans la limite de durée de non concurrence, que les parties ont entendu limiter cette majoration qu’à la seule hypothèse d’absence d’emploi salariée. Il ressort du compte Linkedin de Madame DXXX qu’elle a développé une activité de consultante dans le délai prévu par la clause de non concurrence. La société MXXX est en conséquence fondée à soutenir subsidiairement que Madame DXXX ne peut prétendre qu’au paiement de l’indemnité de non-concurrence de base et non de l’indemnité de non-concurrence majorée.»
Cour d’appel de Grenoble, Ch. Sociale, arrêt du 25 juin 2019, RG 17/4570
Claire BUFFIN-CHAMPIN & Sylvain FLICOTEAUX
SELARL DELMAS FLICOTEAUX
Le Cabinet DELMAS FLICOTEAUX et le GIE QUINTES AVOCATS sont heureux d’accueillir Maître Camille AGRAPART et Maître Céline ESTEVE, Avocates, qui ont prêté serment devant la Cour d’appel de Lyon le 6 décembre 2021.
Maître Camille AGRAPART rejoint l’équipe Quintes Social, et interviendra plus particulièrement en Conseil et Gestion RH aux côtés de Maître BUFFIN CHAMPIN. Cette équipe experte des problématiques sociales intervient à destination des entreprises et de leurs dirigeants.
Maître Céline ESTEVE rejoint pour sa part l’équipe contentieux et interviendra plus particulièrement en contentieux social et de la Sécurité Sociale aux côtés de Maître Sylvain FLICOTEAUX.
Basées à Lyon et Villefranche sur Saône, ces deux équipes interviennent quotidiennement pour les clients et partenaires de QUINTES Avocats.